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12/11/2014

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"Les grands défis pour l'agriculture européenne après 2013" (Académie Agricole Hongroise, Nadudvar)

Discours du Commissaire Dacian Cioloş devant l'Académie Agricole Hongroise Nadudvar, 5 Mars 2010

Monsieur le Ministre Jozsef Graf,

Membres de l'Académie Agricole Hongroise,

Mesdames et Messieurs,

 (Jó napot!)

Je suis heureux d'être ici parmi des collègues qui ont fait de l'agriculture une partie de leur vie.

Il faut le dire, je suis aussi heureux parce-que je viens presqu'en voisin, ma maison est à 200 kilomètres d'ici. Après Bruxelles, Madrid, Paris, Berlin, venir ici c'est un peu rentrer chez moi.

J'ai comme vous le savez une formation d'ingénieur, ayant commencé mes études supérieures à la Faculté d'Horticulture de l'Université des Sciences Agricoles et de Médicine Vétérinaires de Cluj Napoca. Je suis conscient du rôle crucial que vous - chercheurs, enseignants-chercheurs, formateurs, ingénieurs pouvez, et je dirais même, devrez avoir pour améliorer la Politique Agricole Commune, pour la faire mieux répondre aux défis de l'avenir.

C'est pour cela que je suis venu -  pour écouter vos idées sur comment faire de la future Politique Agricole Européenne une politique qui répond mieux aux attentes des agriculteurs mais aussi aux attentes des citoyens européens.

A quoi sert une Politique agricole commune, si ce n’est à aider à mieux se rencontrer l’agriculture européenne et les attentes de la société ?

Depuis sa création, la PAC a été en évolution constante.

Demain, le monde devra répondre aux défis de la sécurité alimentaire, de la gestion des ressources naturelles fragiles par essence, du changement climatique. Et vous le savez bien – demain commence avec aujourd'hui.   

Ici, on le sait tous: l'agriculture peut proposer de solutions à ces défis, mais nous devons chercher à lui donner les outils d'y répondre avec le maximum d'efficacité.

Les enjeux de la compétitivité et de l'innovation se trouvent au centre de cette transformation continue de la Politique Agricole Commune. Et c'est ici où vous avez un rôle très important – pas seulement de poser les questions, mais aussi de proposer des réponses.

 

 

*

L'amélioration de la compétitivité du secteur agricole de l'UE a constitué l'un des objectifs principaux de la dernière vague de reformes de la Politique Agricole Commune. On a amélioré la compétitivité de l'agriculture de l'UE, tout en  réduisant les garanties de soutien des prix, permettant aux producteurs de l'UE à réagir aux signaux du marché.

Parallèlement, a émergé ce qu’il est courant d’appeler le second pilier de la PAC : une politique de développement rural, complément indispensable à cette orientation vers plus de compétitivité. Il fallait en effet une politique de développement rural traitant de l’investissement et la modernisation, de la préservation du paysage rural et du soutien de l'économie rurale en général.  

Toutefois, ces trois dernières années nous ont rappelé de façon brusque que certains défis ne devaient pas être considérés comme gagnés, comme chose du passé. J'y reviendrai.

De fait, il nous reste beaucoup à faire et bon nombre de questions auxquelles il faut répondre:

•        La PAC doit offrir une certaine stabilité pour les agriculteurs, des aliments sûrs et sains aux consommateurs à des coûts abordables, et doit assurer aux contribuables que leur argent est dépensé d'une manière efficace et transparente

•        Afin que l'agriculture européenne réponde à ces objectifs de sécurité alimentaire, mais aussi à des objectifs territoriaux, je suis persuadé que des soutiens financiers publics demeureront indispensables.

•        les critères de distribution des paiements directs devront être rediscutés. Il nous faudra les poser sur de nouvelles bases, réalistes et objectives. Nous avons besoin de convergence pour une meilleure équité entre les différentes catégories d’agriculteurs, entre les Etats membres et entre les régions.

La répartition sur des bases historique était bonne certainement quand elle a été décidée, mais la situation c'est changée- il faut revoir cette méthode. Mais il n'est pas question de créer des problèmes d'un côté pour en résoudre de l'autre

Nous devons être attentifs à ne pas déstabiliser les exploitations agricoles. Il nous faut garantir une certaine stabilité des revenus des agriculteurs. C'est la condition d'un secteur dynamique, qui investit dans son avenir

•        Il nous faudra aussi réfléchir à comment répondre au défi de la stabilité des revenus agricoles et au besoin de palier la volatilité naturelle et de plus en plus grande des marchés. Nous ne pouvons pas nous permettre des crises qui affectent de manière irrémédiable la stabilité de secteurs entiers de l’agriculture européenne. On a besoin de mécanismes modernes de régularisation de marché qui répondent de manière rapide et flexible aux grandes fluctuations des prix.

•        Encore, il faut qu'on trouve des solutions pour la gestion des situations de crise.

Des mesures d'intervention sur le marché devront continuer à exister comme véritables filets de sécurité. En même temps, le marché doit continuer à jouer un rôle régulateur, un rôle d'orientation.  

Et sur cette question, je veux être clair : reprendre les anciens mécanismes de réglementation du marché n'est pas une solution pour l'avenir. Nous avons abandonné certains mécanismes de marché afin que le marché puisse mieux jouer son rôle. Maintenant, il faut améliorer les outils dont nous disposons et / ou en imaginer d'autres, modernes et réactifs, voire proactifs.

 •        Il faut aussi réfléchir comment améliorer l'efficacité de la politique de développement rural tout en assurant l'équilibre entre compétitivité, défis environnementaux est défis de l'économie rurale en général. Mais nous y reviendrons.

 

*        *        *

 

•        L'organisation des filières, la transparence au sein de ces filières et le rééquilibrage des pouvoirs de négociations entre les acteurs de la filière peuvent être des leviers pour plus d'efficacité et une meilleure répartition de la valeur ajoutée. Cela peut être source d'accroissement de la compétitivité de toute la filière en étant facteurs de stabilité et prévisibilité tant pour les consommateurs, les industriels et que les agriculteurs.

•        La diversité de cultures et de produits agricoles est aussi un atout de l'UE qu'il nous faudra mieux exploiter. L'Union Européenne  s'est enrichie en diversité de ses agricultures avec l’élargissement. C'est une richesse qu'il faut faire fructifier en renforçant les liens entre ces agricultures et les attentes des consommateurs, des marchés qu'ils soient locaux, régionaux ou internationaux. Chacun a sa place, chacun doit trouver sa place dans la PAC de demain.

•        Penser que l’amélioration de la compétitivité induit une course inéluctable à la taille des exploitations me paraitrait méconnaitre cette diversité dont l’UE est riche, méconnaître le modèle agricole européen. Il s’agit plus de mettre en adéquation la diversité des agricultures avec la diversité des marchés. Il s’agit d’aider à plus de compétitivité dans le respect de cette diversité.

•        Autre point, qui englobe à un certain degré tous les précédents est la  sécurité alimentaire que L'Europe a obtenue jusqu'aujourd'hui. Prenons garde à trop vite la considérer comme un fait acquis pour toujours.   

N'oublions pas que c'est 5% de la population Européenne – les agriculteurs - qui ont pour fonction de nourrir l'Union Européenne, qui ont pour mission de répondre au défi de la sécurité alimentaire aujourd'hui et demain. N'oublions pas le changement climatique, la croissance démographique et les défis qui vont avec.  

Oui, la fonction première de l'agriculture est de fournir des aliments et la PAC est un outil essentiel pour y arriver. Mais elle ne se limite pas à cela. Le bénéfice que la société en tire est nettement plus large. Nous devons mieux l'expliquer, nous devons mieux le valoriser. Nous devons mettre en lumière la multifonctionnalité de l'agriculture .

*        *        *

Chers collègues,  

Je crois que l'agriculture a des réponses, là aussi, aux exigences environnementales, aux défis en matière de territoire, avec les différentes composantes de ce sujet : environnement, certes, mais aussi équilibre des régions (démographiques et économiques), paysages, changement climatique par exemple.. 

Le sol, les terres agricoles sont un bien stratégique essentiel pour les générations à venir. Il faut les conserver, car c'est la base même de toute sécurité alimentaire dans le temps.

L'agriculture est en charge de la gestion d'une partie très importante des territoires. Par la PAC, nous avons les moyens d’assurer la gestion d'une manière durable d’environ 80% du territoire de l'Union Européenne.     

Qui d’autres que les agriculteurs pourraient gérer le paysage, le territoire, l'environnement? En l'absence d'une politique permettant un maintien harmonieux de l'activité agricole sur tout le territoire européen, le coût environnemental et social serait énorme.

Nous le savons : l’absence de PAC induirait une concentration de la production dans les zones les plus fertiles, avec un impact environnemental fort, d’une autre côté, une déprise agricole dans les régions les plus fragiles, avec de façon latente une disparition à craindre du tissu économique de base que constitue l’agriculture et des coûts environnementaux, sociaux et économiques y compris sur les autres secteurs d’activité.

Il nous faut donc pouvoir produire plus avec moins, en utilisant mieux toutes nos ressources, et en étant économes des ressources les plus rares ou fragiles comme l'énergie, l'eau ou les sols.

En ce qui concerne l'eau, comme vous l'avez bien observée, la question n'est plus si l'agriculture va devoir s'adapter à des conditions de rareté de cette ressource, mais comment elle va pouvoir le faire, tout en maintenant sa compétitivité.

Toutefois, faire de l'agriculture peut signifier non seulement s'adapter au changement climatique mais aussi le combattre.

Avec des bons outils à sa disposition, l'agriculture est une réponse au changement climatique, tant par sa contribution à lutter contre (bioénergies, séquestration de carbone, par exemple) que par sa capacité à innover pour réduire l'impact de cette activité économique sur le climat.

Et l'agriculture européenne a démontré sa capacité à répondre à ce défi (-20 % d'émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2007 contre – 8 % dans les autres secteurs).

Il faudra donc inciter ce secteur à faire encore plus par une politique agricole, alimentaire et rurale.

La question de l’avenir que nous voulons donner à notre agriculture, à notre société et donc la question du futur de la PAC sont cruciales et multiformes.

Il y a beaucoup d’aspects à analyser. Ensemble on a la responsabilité de rendre les résultats et les bénéfices de la PAC non seulement plus efficients mais aussi plus visibles au sein de la société.  

C'est pour cette raison que la PAC n'est pas seulement une question de budget. Le financement est important et il doit répondre aux attentes que nous avons de cette politique, mais plus importantes sont la vision et les objectifs.

C’est pourquoi je veux lancer un large débat public au niveau Européen, impliquant non seulement les États membres, les membres du Parlement Européen, les Parlements nationaux, les producteurs et les organisations professionnelles proche de la problématique de l'agriculture, mais aussi les organisations intéressées par l'environnement, développement durable, bien-être des animaux, la protection des consommateurs, les consommateurs et les contribuables - pour n'en nommer que quelques-uns.

Le rôle de la communauté scientifique et académique, votre rôle est essentiel pour donner encore plus de substance à ce débat et pour proposer des réponses innovantes ou non, mais en tout cas pertinentes aux questions qui se posent.

Au cours des prochains mois, je vais me faire un devoir d’être dans une phase intense d'écoute. 

C'est pour cette raison que je vous invite de participer au débat que nous lancerons en d'Avril, avec une conférence de première synthèse en Juillet. Avec vos contributions, avec ses propres analyses aussi, la Commission préparera ensuite un projet de  communication sur l'avenir de la PAC avant la fin de l'année.

Les travaux de cette Académie, vos idées et réponses, comme celles des autres institutions similaires en Europe, que nous appelons de nos vœux, sont et seront à cet égard très précieuses.

Aussi, je vous remercie tous déjà du soutien et de la réactivité avec laquelle vous participerez à ce débat et contribuerez à construire la PAC, à construire l’agriculture de demain.

Je vous remercie pour votre attention (Kösz a figyelmet!)

Dernière mise à jour : 01/04/2015 |  Haut de la page