Neutralité des plateformes : les gros silos actuels sont-ils incontournables ?

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    Ines Galland
    20 March 2015 - updated 4 years ago
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Author(s): 
Stephane Bortzmeyer
Year of publication: 
2014

Interesting reading about the French and German proposals to "regulate internet platform" from an expert, Stephan Bortzmeyer:

Que contient le rapport du CNN ? Il plonge dans l'erreur dès le début en affirmant « Le Conseil relevait à cette occasion que la société numérique n’est pas seulement mise en action par des réseaux physiques mais aussi par un ensemble de services, parmi lesquels les plateformes occupent une place centrale. » C'est le plus gros problème avec ce rapport : il affirme que les gros silos comme Google sont incontournables. Mais ce n'est pas vrai. Autant le FAI est un intermédiaire obligé (à part les projets très expérimentaux et très limités de réseaux « mesh »), autant l'usage de Gmail n'est pas obligatoire. On peut envoyer et recevoir du courrier sans Gmail, on peut louer des machines virtuelles ailleurs que sur Amazon, on peut stocker et distribuer des fichiers sans Dropbox. Cela fait une énorme différence entre les FAI et les gros silos : s'il est légitime de protéger la neutralité de l'Internet contre les abus des intermédiaires, rien ne dit que cela doive forcément être le cas pour des « plateformes » qu'on n'est pas obligés d'utiliser.

(...)

Mais la solution est-elle d'imposer à ces silos des règles protégeant (sans doute fort mal) leurs victimes ? On entrera alors dans une logique dangereuse, où on laisse ces entreprises vous exploiter, en mettant simplement quelques garde-fous (l'expression, révélatrice, est du CNN : « Il est donc crucial de développer des garde-fous adaptés aux dynamiques de plateformes afin de protéger les usagers et l’innovation lorsque le passage d’une logique ouverte à une logique fermée se produit »). Pour reprendre les termes de Bruce Schneier, les silos sont des seigneurs féodaux : on obtient d'eux quelques services et, en échange, ils sont vos maîtres. Faut-il limiter les excès des seigneurs, leur imposer des garde-fous ? Ou bien faut-il plutôt passer à un régime post-féodal ?

Car il est une chose que les ministres ne savent pas : l'Internet existe sans les GAFA. Ils n'ont pas toujours été là et ils ne seront pas toujours là. Il existe des alternatives, comme le développement du pair-à-pair et comme l'auto-hébergement. Il est absurde que, pour partager des fichiers, on les mette à des milliers de kilomètres de là, sur Dropbox, alors qu'on pourrait partager directement entre utilisateurs.